Violence faite aux femmes : Le cas Djelykaba Bintou, un symbole du combat à mener en Guinée

Violence faite aux femmes : Le cas Djelykaba Bintou, un symbole du combat à mener en Guinée. © DR

Le 2 avril 2025, la chanteuse guinéenne Djelykaba Bintou a révélé au monde entier l’envers douloureux de sa vie privée, en publiant un message poignant sur Facebook. Accompagnée d’une photo où son visage tuméfié porte les marques des violences qu’elle a subies, elle dénonce, dans un cri du cœur, la banalisation des violences conjugales dans la société guinéenne. « Je ne savais pas que frapper à sang une femme et de manière répétée est considéré comme normal dans la société », écrit-elle, une déclaration qui secoue les consciences.

Bien que Djelykaba Bintou n’ait pas explicitement désigné son agresseur, les spéculations ont rapidement convergé vers son « ex-mari », le célèbre chanteur Azaya. Ce dernier, malgré la gravité des accusations, n’a pas encore réagi publiquement. Curieusement, il a récemment lancé un clip intitulé « Cercle de feu », dans lequel il aborde les thèmes de la trahison et des mensonges dans un mariage, alimentant ainsi les débats autour de l’affaire. Un hasard troublant ou une résonance particulière aux accusations qui pèsent sur lui ? Les interrogations sont nombreuses.

Une réaction collective et une prise de conscience grandissante

Le témoignage de Djelykaba Bintou a enflammé la toile, et la réaction du public n’a pas tardé. En Guinée, la colère est palpable. Des associations comme le Club des jeunes filles leaders de Guinée ont exprimé leur indignation, dénonçant cet acte comme le dernier d’une série de violences envers les femmes. Elles appellent à une réaction de la justice et à une prise de position ferme pour lutter contre l’impunité.

La ministre de la Promotion féminine, Charlotte Daffé, a apporté son soutien à Djelykaba Bintou, insistant sur l’urgence de briser le silence autour des violences conjugales et soulignant l’engagement de son ministère à accompagner les victimes. Elle a réaffirmé que son gouvernement entendait poursuivre les efforts pour lutter contre cette injustice systématique.

Le soutien ne se limite pas aux frontières de la Guinée. L’ambassade de France en Guinée a d’abord apporté son soutien aux concerts à venir d’Azaya, mais face à l’ampleur des critiques, son message de soutien a été supprimé. Une réaction qui a soulevé de vives interrogations sur la manière dont les institutions internationales abordent le sujet des violences conjugales. Après avoir rappelé la présomption d’innocence, l’ambassade a affirmé sa solidarité avec les victimes, mais ce revirement n’a pas apaisé les esprits. Les internautes guinéens ont exprimé leur incompréhension face à sa prise de position initiale.

Un contexte alarmant de violence sur le genre

Le cas de Djelykaba Bintou survient dans un contexte particulièrement sombre pour les femmes en Guinée, où les violences basées sur le genre sont un fléau persistant. Récemment, plusieurs femmes ont perdu la vie sous les coups de leurs agresseurs, notamment à Kankan et Conakry. Ces drames ont attiré l’attention sur l’ampleur de ce phénomène, qui reste largement ignoré ou minimisé dans le discours public.

L’affaire de Djelykaba Bintou pourrait bien marquer un tournant. La pression de l’opinion publique, combinée au soutien de la société civile, met désormais en lumière l’ampleur du problème et la nécessité d’une action concrète. Si la justice décide d’ouvrir une enquête approfondie et de prendre des sanctions, cela pourrait avoir des répercussions importantes, tant sur l’image publique d’Azaya que sur la manière dont la société guinéenne perçoit les violences faites aux femmes.

Une société en mutation : le temps de la révolte et de la reconnaissance

Le mouvement de solidarité envers Djelykaba Bintou est un signe clair d’un changement dans la société guinéenne. De plus en plus de voix refusent de se taire face à l’injustice et à la violence. Ce soutien populaire à la victime, bien qu’encourageant, ne doit pas se limiter à une simple émotion passagère. Il doit être le point de départ d’un véritable changement de mentalité et de culture.

Il est grand temps de briser l’omerta qui entoure les violences conjugales en Guinée, en Afrique et dans le monde d’une manière générale. Les femmes ne doivent plus accepter de souffrir en silence, et les violences ne doivent plus être vues comme une fatalité. La lutte pour la justice, pour la reconnaissance des droits des femmes et pour la fin de l’impunité commence par des actes concrets. Cette affaire, si elle est traitée avec sérieux par les autorités judiciaires, pourrait bien être le catalyseur d’un changement historique dans la lutte contre les violences faites aux femmes en Guinée et au-delà.

Amichou CAMARA

Auteur/Autrice

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