Sénégal : les avocats d’ex-ministres accusés de malversations saisissent l’ONU pour des procédures « illégales »

L'ex-président sénégalais Macky Sall. © Présidence du Sénégal

Les avocats de cinq anciens ministres sénégalais inculpés pour des malversations présumées ont dénoncé jeudi des procédures « inéquitables et illégales » visant l’entourage de l’ex-président Macky Sall, annonçant la saisine de deux instances onusiennes.

Un cabinet d’avocats français et un collectif d’avocats sénégalais ont saisi la rapporteuse spéciale de l’ONU sur l’indépendance des juges et des avocats, Margaret Satterthwaite, pour « plusieurs violations graves de l’indépendance judiciaire et des garanties du procès équitables », selon un document consulté par l’AFP.

Ces violations visent les inculpations devant une cour spéciale de cinq ex-ministres, notamment pour détournements présumés d’un fonds anti-Covid.

Trois d’entre eux – Amadou Mansour Faye (ex-ministre au Développement communautaire, également beau-frère de Macky Sall), Aïssatou Sophie Gladima (Mines), Moustapha Diop (Développement industriel) – ont été incarcérés. Deux autres – Salimata Diop (Femmes) et Ismaïla Madior Fall (Justice) – ont bénéficié d’une liberté conditionnelle.

La Haute cour de justice (HCJ) du Sénégal est « une juridiction d’exception dans laquelle il n’y a aucune garantie procédurale », assure l’avocat français Antoine Vey, qui dénonce notamment l’absence d' »instruction contradictoire » et d' »accès au dossier » pour la défense.

Selon la communication transmise à la rapporteuse spéciale, « la HCJ est composée exclusivement – à l’exception du président – de parlementaires élus, sans formation juridique requise, investis de fonctions politiques partisanes ». Outre le président de l’instance, le procureur est également un magistrat.

L’avocat parisien réclame « le démantèlement de cette cour de justice » habilitée à juger le chef de l’État et les membres du gouvernement pour des crimes commis dans l’exercice de leurs fonctions, et que « les gens qui ont été incarcérés sans accès aux pièces soient libérés et placés sous contrôle judiciaire ».

Un autre organe onusien, le Groupe de travail sur la détention arbitraire, a également été saisi concernant la privation de liberté de huit anciens dirigeants sénégalais, selon M. Vey.

Parmi eux figurent les trois ministres incarcérés précités, ainsi que l’ancien chef de cabinet du président Sall, Moustapha Diakhaté, en procès pour « offense au chef de l’État ». Le jugement est attendu le 9 juillet.

« Nous sommes prêts à engager un bras de fer contre des pratiques diverses (visant à) faire taire l’opposition », a ajouté l’avocat français.

Le président Bassirou Diomaye Faye, élu en mars 2024, et son Premier ministre ont promis de faire rendre des comptes aux anciens dirigeants qu’ils accusent d’agissements coupables dans la gestion des affaires, à commencer par l’ex-président Macky Sall (2012-2024).

Depuis, de nombreuses poursuites judiciaires ont été lancées contre des dignitaires de l’ancien régime.

La commission d’instruction qui a inculpé les cinq ministres décidera pour chacun d’eux d’un non-lieu ou d’un renvoi devant la HCJ, dont les décisions ne sont pas susceptibles d’appel.

Avec AFP

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