Sénégal : le gouvernement fustige un ministre ayant qualifié les tirailleurs de « traitres »

Une entrée du cimetière de Thiaroye (Sénégal), le 30 novembre 2007. © AFP
Le gouvernement sénégalais est « en total déphasage » avec le ministre ayant qualifié les tirailleurs sénégalais de « traitres » ayant combattu leurs frères africains, a affirmé jeudi son porte-parole, des propos qui ont soulevé un tollé dans le pays.

Ministre en charge de l’Administration et de l’Equipement à la présidence de la République, Cheikh Oumar Diagne avait affirmé que « ceux qui célèbrent les tirailleurs ne savent pas ce que sont » en réalité ces soldats coloniaux, dans une interview avec une télévision locale, fafa Tv, publiée le 21 décembre.

« Les tirailleurs sont des traitres qui se sont battus contre leurs frères, dans leur pays, pour de l’argent » lors de révoltes ou guerres anti-coloniales en Afrique, avait dit M. Diagne.

« Cette sortie est très malheureuse. Je suis en total déphasage avec ce que M. Diagne a dit. Je considère que ces tirailleurs sont des héros de la Nation », a déclaré jeudi le ministre Moustapha Njekk Sarré sur la radio privée RFM.

M. Diagne « s’est lourdement trompé. Ces tirailleurs ne sauraient être considérés comme des traitres », a-t-il dit. Il se demande « pourquoi il (M. Diagne) a ramé à contre-courant » sur les tirailleurs parce qu' »il n’y a pas plus d’un un mois, le président de la République (Bassirou Diomaye Faye) a organisé une grande cérémonie en leur honneur ».

« Il y a eu des moments où la France leur a fait faire une sale besogne. Mais si on fait une moyenne générale et qu’on décrit la souffrance et l’héroïsme dont ils ont fait montre, ce serait injuste de leur donner ce qualificatif de traitres », avait rétorqué mardi sur la radio privée RFM l’historien Mamadou Fall.

Sur internet et dans les médias, les propos de M. Diagne ont également été critiqués, certains réclamant sa démission.

Le Sénégal a commémoré cette année, avec une envergure inédite, les événements du 1er décembre 1944 au camp militaire de Thiaroye, près de Dakar. Les forces coloniales françaises avaient tiré sur des tirailleurs rapatriés des combats en Europe, pas seulement sénégalais mais provenant aussi d’autres pays africains, qui réclamaient le paiement d’arriérés de solde.

De nombreuses zones d’ombre subsistent sur les circonstances du drame, le nombre de tirailleurs tués, leur identité, le lieu de leur inhumation.

Les autorités françaises de l’époque avaient admis la mort de 35 personnes. Plusieurs historiens avancent un nombre de victimes bien plus élevé, jusqu’à 400.

Avec AFP

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