En fin de journée, les rues de la capitale s’étaient vidées, quadrillées par la police. Quelques pneus brûlaient encore, dégageant d’épais panaches de fumée noire, comme plusieurs barricades, et des check-points restaient en place, notamment à proximité de la présidence, a constaté une équipe de l’AFP.
Le bras de fer politique et judiciaire entre le candidat à la présidentielle et le parti au pouvoir s’est traduit toute la journée par des feux de poubelle et des jets de pierre contre les forces de l’ordre dans plusieurs quartiers.
Cette journée « de libération du Mozambique », comme il l’a baptisée, était présentée comme le point culminant de semaines de contestation des élections depuis la victoire proclamée du Frelimo, formation à la tête de ce pays d’Afrique australe depuis près d’un demi-siècle.
Des groupes ont afflué dans plusieurs endroits de la capitale. « C’est beaucoup d’adrénaline mais ça vaut le coup », estime Vadi, manifestante dissimulée derrière d’épaisses lunettes noires. « Tout ce qu’on veut, c’est Venancio et ce sera terminé. »
« Il y a une atmosphère révolutionnaire », a affirmé jeudi Venancio Mondlane dans un entretien à l’AFP. « Nous sommes au bord d’une transition historique et politique unique dans le pays. »
Crédité de 20% des voix par les résultats officiels, l’opposant revendique la victoire aux élections générales du 9 octobre. Un scrutin entaché de multiples irrégularités, selon les observateurs, et contesté dans la rue. Au moins 20 personnes ont trouvé la mort dans ces affrontements, selon le Haut Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU.
« Ce ne sont pas des morts, ce sont des meurtres », a dénoncé Venancio Mondlane, en accusant le Frelimo de se maintenir au pouvoir « par la force » et le « terrorisme d’Etat ».
La manifestation de jeudi, répartie en six cortèges, devait converger vers la présidence.
« Mais on ne nous laisse pas avancer vers la zone », a observé Derito, manifestant au visage recouvert d’un masque chirurgical.
« L’objectif n’est pas du tout de prendre le pouvoir par la force, ni de faire un quelconque coup d’État », avait assuré Venancio Mondlane.
– « Plus de valeur vivant » –
Drapeaux mozambicains dans les mains et claquettes aux pieds, une foule dense a répondu au rendez-vous donné par « Venancio », comme l’appelle son électorat jeune et connecté.
Après avoir annoncé sa participation, M. Mondlane, un ancien animateur de télévision de 50 ans, a annoncé à l’AFP qu’il ne serait finalement pas à Maputo jeudi, expliquant avoir quitté le continent par crainte pour sa sécurité.
« Tout le monde, dans 99% des messages, me dissuadait d’aller à Maputo (…) Certains m’ont même dit que j’avais plus de valeur vivant que mort », a-t-il expliqué.
Pancartes « Povo no poder » (« Le peuple au pouvoir ») à bout de bras, ses partisans entendent « faire pression sur le pouvoir », a expliqué l’opposant, qui s’est allié au modeste parti Podemos après avoir échoué à prendre la tête de l’historique faction d’opposition Renamo.
Mardi, le ministre de la Défense Cristovao Chume avait mis en garde les manifestants: « Si l’escalade de la violence se poursuit, les forces armées devront protéger les intérêts de l’Etat » face à cette « intention de changer le pouvoir démocratiquement établi ».
D’après l’ONG anticorruption Public Integrity Center (CIP), les élections générales du 9 octobre sont « les plus frauduleuses depuis 1999 ».
Les observateurs électoraux avaient signalé des irrégularités avant, pendant et après le vote, notamment des « altérations injustifiées de résultats ».
Avec AFP