La France va reconnaître l’Etat de Palestine en septembre à l’ONU, a annoncé jeudi le président Emmanuel Macron, espérant créer une dynamique collective en ce sens, une décision aussitôt décriée par Israël comme une « récompense de la terreur » et « fermement » rejetée par les Etats-Unis.
La décision française « récompense la terreur », a fustigé le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, en référence à l’attaque sans précédent du Hamas sur le sud d’Israël le 7 octobre 2023. « Soyons clairs: les Palestiniens ne cherchent pas à obtenir un Etat aux côtés d’Israël, ils cherchent un Etat à la place d’Israël », a-t-il martelé.
Proche allié d’Israël, les Etats-Unis ont « fermement » rejeté le projet français, évoquant une décision « imprudente » qui fait reculer la paix. « C’est un camouflet pour les victimes du 7 octobre », a déclaré le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio.
Le chef d’Etat français avait annoncé plus tôt ce projet sur les réseaux sociaux: « Fidèle à son engagement historique pour une paix juste et durable au Proche-Orient, j’ai décidé que la France reconnaîtra l’Etat de Palestine. J’en ferai l’annonce solennelle à l’Assemblée générale des Nations unies, au mois de septembre prochain », a-t-il écrit sur X et Instagram.
La France coprésidera alors avec l’Arabie saoudite une conférence internationale au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement visant à relancer la solution dite « à deux Etats », palestinien et israélien.
Cette conférence, initialement prévue en juin, avait été reportée à la dernière minute en raison de la guerre entre Israël et l’Iran. Dans l’intervalle, une réunion au niveau ministériel se tiendra les 28 et 29 juillet à New York.
A ce jour, au moins 142 Etats ont reconnu un Etat palestinien, selon un décompte de l’AFP.
– « Mobilisation » –
Le vice-président de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hussein al-Cheikh, a de son côté salué cette décision en faveur de « l’établissement de notre Etat indépendant ». C’est un « pas positif », a renchéri le Hamas, en appelant d’autres pays à suivre cet exemple.
L’Arabie saoudite s’est aussi félicitée d’une décision « historique » et a appelé les autres pays à prendre « des mesures positives similaires ».
La France « mobilisera tous ceux de ses partenaires internationaux qui souhaitent y prendre part », a promis Emmanuel Macron dans une lettre adressée au président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.
Le 19 mai, le Royaume-Uni, le Canada et la France avaient ouvert la voie à une éventuelle reconnaissance dans une déclaration commune. Mais depuis, aucun des dirigeants de ces trois pays n’avait franchi le pas.
Le 10 juillet, en visite au Royaume-Uni, Emmanuel Macron avait appelé à une reconnaissance commune de l’Etat de Palestine par la France et le Royaume-Uni, sans succès pour l’heure.
En mai 2024, l’Irlande, l’Espagne et la Norvège, rejointes un mois plus tard par la Slovénie, avaient déjà franchi le pas en Europe.
« Ensemble, nous devons protéger ce que (Benjamin) Netanyahu essaie de détruire. La solution à deux Etats est la seule solution », a réagi le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez sur X.
Mais les Européens restent divisés sur cette question, l’Allemagne estimant qu’une reconnaissance aujourd’hui serait « un mauvais signal ».
– « Décision précipitée » –
Dans une lettre en date du 9 juin adressée au président français, Mahmoud Abbas s’est engagé à une démilitarisation du mouvement islamiste du Hamas, à l’origine des attaques du 7 octobre 2023 en Israël, dans le cadre d’un futur Etat palestinien.
Il s’est aussi dit prêt à organiser des élections législatives et présidentielle en 2026 afin de « renforcer la légitimité » de l’Autorité palestinienne et son « autorité sur le futur Etat palestinien », y compris Gaza, rappelle Emmanuel Macron dans sa lettre.
Autant de gages en faveur de la solution à deux Etats, estime le président français, en espérant convaincre les Israéliens qu’elle est aussi dans leur intérêt.
Cette annonce intervient alors que l’émissaire américain Steve Witkoff a acté jeudi l’échec des pourparlers menés à Doha en vue d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza.
Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin aux souffrances des plus de 2 millions d’habitants du territoire palestinien, soumis à un blocus qui les prive d’une aide humanitaire vitale.
Dans ce contexte, le Premier ministre britannique Keir Starmer a annoncé un « entretien d’urgence » vendredi avec ses homologues français et allemand pour voir comment « arrêter les massacres et fournir à la population la nourriture dont elle a désespérément besoin ».
En France, le président du Rassemblement national (extrême droite), Jordan Bardella, a déploré une « décision précipitée », qui accordera au Hamas « une légitimité institutionnelle et internationale inespérée ».
Le leader de La France insoumise (gauche radicale) Jean-Luc Mélenchon s’est à l’inverse félicité d’une « victoire morale », tout en déplorant qu’elle ne soit pas immédiate.
Avec AFP