La réunion des présidents de la République démocratique du Congo et du Rwanda prévue dimanche à Luanda a été annulée, douchant tout espoir d’un accord dans l’immédiat pour rétablir la paix dans l’est de la RDC déchiré depuis 30 ans par des conflits.
Un accord « pour le rétablissement de la paix et de la stabilité dans l’est de la RDC », selon l’intitulé consulté par l’AFP, devait être posé sur la table. Deux jours avant le sommet, toutes les parties s’étaient dites optimistes pour arriver à la signature du texte.
Mais samedi, une réunion des ministres des Affaires étrangères des deux pays qui s’est également tenue à Luanda, portant sur les conditions de l’accord et qui s’est étirée jusque tard dans la nuit, s’est soldée par un échec des négociations.
« Il y a une impasse car les Rwandais ont posé comme préalable à la signature d’un accord que la RDC mène un dialogue direct avec le M23 », avait affirmé dimanche matin à l’AFP Giscard Kusema, porte-parole de la présidence congolaise, présent à Luanda.
Quelques minutes plus tard, la présidence angolaise annonçait à la presse que « contrairement aux attentes, le sommet n’aura plus lieu aujourd’hui ».
Félix Tshisekedi était déjà à la présidence à Luanda, capitale de l’Angola. Paul Kagame ne s’y est jamais rendu, estimant selon Kigali que le sommet n’était « plus pertinent » après l’échec de la réunion ministérielle de samedi.
Le sommet de la paix n’était « plus pertinent » à cause de l' »intransigeance » de négociateurs congolais, a commenté dimanche à l’AFP le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe.
Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères rwandais a également dénoncé « le contexte des menaces constantes émanant des responsables de la RDC, y compris du Président, en vue d’un changement de régime au Rwanda ».
– Pas de « convergence de vues » –
De son côté, le ministre angolais des Affaires étrangères, Tete António, a déclaré à la presse que les différentes parties ne sont « pas parvenus à une convergence de point de vue sur tous les aspects ».
« Le seul paragraphe de l’accord qui devait être négocié au niveau ministériel et sur lequel les ministres ont négocié jusqu’à très tard hier a fait l’objet des dernières négociations et nous ne sommes pas parvenus à une convergence de points de vue sur tous les aspects », a-t-il détaillé.
Le M23 (« Mouvement du 23 mars »), groupe armé soutenu par Kigali et son armée, s’est emparé depuis novembre 2021 de vastes pans de territoire dans l’est de la RDC riche en minerais.
Goma, capitale de la province du Nord-Kivu qui compterait plus d’un million d’habitants et près d’un million de déplacés de guerre entassés dans des camps, est encerclée par les rebelles et des unités de l’armée rwandaise.
Sur le terrain, des combats ont été signalés dimanche dans la région. Une demi-douzaine de cessez-le-feu et trêves ont déjà été décrétés puis violés dans l’est de la RDC.
Un nouveau cessez-le-feu a été signé fin juillet. Il a déjà été mis à mal par au moins une offensive du M23 et des incidents réguliers au cours des dernières semaines entre rebelles et forces armées congolaises.
Fin novembre, la RDC et le Rwanda avaient déjà approuvé un concept d’opérations (CONOPS) consulté par l’AFP établissant, en théorie, le départ des soldats rwandais et la neutralisation par l’armée congolaise des FDLR en juste 90 jours.
Les FDLR, groupe armé formé par d’anciens hauts responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 depuis réfugiés en RDC, et qui combat le M23 tout comme une nébuleuse de milices pro-Kinshasa dans l’est, constitue aux yeux de Kigali une menace permanente.
Un premier « plan harmonisé » de sortie de crise daté d’août prévoyait initialement la neutralisation des FDLR comme préalable au départ des soldats rwandais. Il avait été rejeté par la RDC qui réclamait « la simultanéité des opérations ».
« Le Rwanda conditionne maintenant la signature d’un accord par un dialogue direct entre nous et le M23 ce qui n’a jamais été prévu depuis le début des discussions », a dénoncé dimanche auprès de l’AFP une source gouvernementale congolaise.
Selon Kigali, Kinshasa avait toutefois donné son accord de principe, mais dans le cadre d’une autre initiative de résolution de crise sous médiation kényane, centrée sur la question des groupes armés présents dans l’est de la RDC. La RDC réfute cette information.
Kinshasa, qui qualifie le M23 d' »ennemis de la République », ne prévoit à ce stade de négocier qu’avec le Rwanda qui soutient les rebelles « et sans qui le M23 n’existerait pas ».