Censé trouver une position commune vers une intelligence artificielle plus éthique et contrôlée, le sommet de Paris sur l’IA a vu s’affronter mardi deux visions du monde, les Etats-Unis appelant à limiter la régulation pour « ne pas tuer une industrie en plein essor » qu’ils dominent.
Le sommet a été marqué par le discours très offensif du vice-président américain J.D. Vance, dont c’est le premier déplacement à l’international depuis la prise de fonction de Donald Trump fin janvier et l’annonce de « Stargate », un plan d’investissements dans l’IA américaine à hauteur de 500 milliards de dollars.
A rebours d’une Europe voulant aller plus vite tout en définissant un cadre à l’essor de l’IA, il a souhaité faire « tous les efforts possibles pour encourager les politiques pro-croissance » en la matière.
« Les Etats-Unis sont les leaders dans l’IA et notre administration entend qu’ils le restent », a-t-il souligné, quelques heures après des informations sur une offre non sollicitée d’Elon Musk, l’homme le plus riche du monde et membre de l’administration Trump, sur la start-up OpenAI, à l’origine de ChatGPT.
Selon le Wall Street Journal, le milliardaire (qui dispose déjà de sa propre start-up d’IA générative, xAI, lancée en 2023) veut, avec un groupe d’investisseurs, racheter l’organisation à but non lucratif qui contrôle OpenAI pour 97,4 milliards de dollars.
« Non merci », lui a répondu lundi sur X le patron d’OpenAI, Sam Altman, présent à Paris.
Avant de quitter la nef du Grand Palais pour l’Elysée où il doit déjeuner avec le président Emmanuel Macron, J.D. Vance a également mis en garde contre les partenariats avec les « régimes autoritaires », dans une référence à peine voilée à la Chine. « S’associer avec eux (ces régimes, NDLR) revient à enchaîner votre nation à un maître autoritaire qui cherche à infiltrer, s’installer et s’emparer de votre infrastructure d’information ».
– « Leadership à saisir » –
En réponse aux ambitions américaines, l’Union européenne a annoncé son souhait de mobiliser 200 milliards d’euros pour des investissements dans l’IA en Europe, dont 150 milliards venant de grands groupes.
Le « leadership mondial est toujours à saisir », a estimé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, évoquant « le plus grand partenariat public-privé dans le monde pour le développement d’une IA fiable », au sein de l’alliance « EU AI Champions Initiative » qui regroupe plus de 60 entreprises.
Dans le même temps, alors que la réglementation de l’IA, l’importance des modèles en source ouverte (qui permettent l’accès à leur code informatique et autorisent d’autres à les utiliser) et le respect de la vie privée ont été largement abordés lundi, les attentes portent sur la déclaration commune attendue en conclusion du sommet.
Lundi, Max Tegmark, président du Future of Life Institute, un organisme non lucratif basé aux États-Unis qui met régulièrement en garde contre les méfaits de cette technologie, avait appelé les participants à « ne pas signer » cette déclaration. En cause, notamment, l’absence supposée de mention relative aux « risques » associés à l’IA.
La dernière journée du sommet sur l’IA est également l’occasion d’un rendez-vous « business » pour les entreprises de la tech européenne et internationale à Station F, l’incubateur de start-up fondé par le milliardaire français Xavier Niel. En présence notamment d’OpenAI.
Pour son ouverture lundi, le sommet a vu Emmanuel Macron promettre une « stratégie » comparable à celle mise en oeuvre pour reconstruire Notre-Dame de Paris après l’incendie de 2019. Objectif: accélérer la construction d’infrastructures en France dédiées à cette technologie, avec un plan d’investissements privés à hauteur de 109 milliards d’euros.
Il faut « choisir l’Europe et choisir » la France, a martelé M. Macron, avec pour arguments l’électricité bas carbone, les talents et la promesse d’une accélération des procédures. Il doit aller mardi après-midi à la rencontre des acteurs de la tech, dans les allées de Station F, au milieu des 3.000 à 4.000 entrepreneurs réunis.
Avec AFP