Le nouveau Premier ministre centriste François Bayrou, 73 ans, a vanté sur X, un « collectif d’expérience pour réconcilier et renouer la confiance avec tous les Français ».
Sur la télévision BFMTV, il s’est dit « persuadé » d’échapper à la censure des députés, qui a fait chuter début décembre son prédécesseur, l’ancien commissaire européen Michel Barnier.
Mais la composition de ce gouvernement, toujours orienté à droite et au centre, a suscité une avalanche de critiques des partis de l’opposition de gauche, arrivée en tête des législatives de juin, et du Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen (extrême droite).
« Une droite extrême au pouvoir, sous la surveillance de l’extrême droite », a jugé le patron du Parti socialiste, Olivier Faure. Une équipe « rempli(e) de gens désavoués dans les urnes et qui ont contribué à couler notre pays », a renchéri la cheffe des députés LFI (gauche radicale) Mathilde Panot. La cheffe des Ecologistes, Marine Tondelier, a accusé le Premier ministre d' »indignité », lui reprochant de se mettre « entre les mains de l’extrême droite ».
« Heureusement que le ridicule ne tue pas » car « François Bayrou a réuni la coalition de l’échec », a ironisé de son côté le président du RN, l’eurodéputé Jordan Bardella.
Un temps pressenti au ministère de la Justice, un des poids lourds du parti de droite Les Républicains, Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France (nord), a indiqué avoir été écarté du nouveau gouvernement « en raison de l’opposition du Rassemblement national », dont il est de longue date un adversaire virulent.
Lundi soir, M. Bayrou a réfuté toute « influence » de l’extrême droite, affirmant que M. Bertrand proposait une « approche » qui n’est « pas la mienne ».
– Deux ex-Premiers ministres –
L’équipe de M. Bayrou consacre le retour de deux ex-Premiers ministres, Elisabeth Borne (Education), première cheffe de gouvernement (2022-2024) du second mandat d’Emmanuel Macron, et Manuel Valls (Outre-mer), Premier ministre (2014-2016) de François Hollande. Autre revenant: l’ambitieux Gérald Darmanin, ancien ministre de l’Intérieur, qui hérite du portefeuille de la Justice.
Elle est marquée par une certaine continuité avec 19 ministres conservés, dont ceux des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot et des Armées Sébastien Lecornu reconduits à leurs postes, tout comme le très conservateur Bruno Retailleau, renouvelé au ministère de l’Intérieur malgré son profil clivant.
Le directeur de la Caisse des dépôts et consignations, institution financière publique, Eric Lombard, devient ministre de l’Economie et des Finances, poste crucial au moment où la France affronte l’une des pires crises budgétaires de son histoire récente.
Dès sa prise de fonctions, ce technicien de l’économie a appelé à « traiter notre mal endémique, le déficit », qui devrait culminer à 6,1% du PIB en 2024.
François Bayrou a été nommé par Emmanuel Macron au terme de longues consultations pour trouver un successeur au conservateur Michel Barnier, dont le gouvernement minoritaire a été renversé le 4 décembre par le vote cumulé des députés de gauche et d’extrême droite après seulement trois mois en poste.
M. Bayrou est le sixième chef du gouvernement depuis la première élection de M. Macron en 2017 et le quatrième depuis le début de l’année, une instabilité que n’avait pas connue la France depuis des décennies.
– Popularité historiquement basse –
Le nouveau Premier ministre doit naviguer sur la scène politique éclatée issue des législatives anticipées organisées après la dissolution surprise de l’Assemblée nationale par M. Macron en juin. L’hémicycle est fracturé en trois blocs (gauche / centre-droit et droite / extrême droite) dont aucun ne dispose de la majorité absolue.
M. Bayrou souhaitait former une équipe resserrée et la plus ouverte possible. Il voulait qu’elle comprenne des personnalités de poids, de gauche comme de droite et du centre, afin de répondre aux urgences qu’affronte le pays et d’éviter une nouvelle censure. Mais cet objectif d’ouverture est loin d’être atteint.
Les ministres devront surtout préparer dans l’urgence un budget pour 2025, sous la pression des oppositions et des marchés financiers.
M. Bayrou a une cote de popularité historiquement basse pour une prise de fonction, 66% des Français se disant mécontents, selon un baromètre publié dimanche.
Avec AFP