« Il n’y a pas beaucoup d’argent, tu ne vends pas de disques, au niveau des plateformes musicales aussi c’est très dur », résume l’artiste, qui a dû multiplier les petits boulots pour continuer sa passion.
« J’ai fait de tout, j’ai travaillé, fait de la vente, parce que je voyais qu’avec la musique je ne m’en sortais pas », confie-t-il.
« Il peut y avoir une économie interne qui fait vivre un grand nombre de musiciens, mais très chichement, par exemple pour les rituels » de guérison dont la musique de Ndox Electrique s’inspire, précise François Cambuzat, initiateur du projet.
« On parle de revenus ridicules par rapport au coût de la vie au Sénégal. Des gens peuvent travailler huit à dix heures par jour pour des spectacles et gagnent entre cinq et dix euros », à comparer avec le cachet minimum en France qui est autour de 135 euros, souligne-t-il.
Quant aux droits d’auteur, il existe bien au Sénégal l’équivalent de la Sacem (Société des auteurs-compositeurs et éditeurs de musique), société française chargée de collecter et répartir ces droits, mais « elle est très mal organisée et coûte cher », selon ce routard de la musique qui a sillonné l’Afrique et l’Asie au fil de ses projets artistiques.
« Alors les musiciens africains s’inscrivent souvent directement à la Sacem puisque maintenant c’est possible », relève François Cambuzat.
– « Devenir des artistes professionnels » –
C’est exactement ce que viennent de faire, depuis le lointain Zimbabwe, les membres du groupe Bantu Spaceship, eux aussi à l’affiche des Trans.
« On espère que ça nous apportera un peu de revenus », dit en anglais Joshua Chiundiza, producteur et co-fondateur du groupe qui mêle la pop traditionnelle zimbabwéenne, le jit, et la musique électronique.
Tout comme sa comparse Thando Mlanbo (guitare et chant), Joshua « travaille à temps plein pour payer les factures » et doit jongler pour se consacrer à sa musique.
« Il y a un réel appétit pour la musique et les arts dans nos pays », assure Thando, « il s’agit surtout de rendre ça viable financièrement » pour développer tout un écosystème autour de la musique.
« Au Zimbabwe, vous trouverez de nombreux musiciens qui ont bricolé leur propre studio d’enregistrement et qui cherchent à imiter les maisons de disques, mais ce n’est pas encore ça », estime Joshua.
Et les réseaux sociaux ? Pour François Cambuzat, ils peuvent éventuellement permettre d’étendre son public, voire pour les plus chanceux de se faire repérer par un agent étranger, mais ils ne rapportent pas.
« Je connais beaucoup de gens qui ont 40.000 abonnés mais qui ne gagnent pas un euro! Et sur ces 40.000 abonnés, combien vont venir vous voir en concert ? », lance-t-il.
Le rôle des Trans Musicales de Rennes ou du festival Guess Who d’Utrecht (Pays-Bas), réputés pour lancer de nouveaux talents, est donc crucial pour des groupes comme Ndox Électrique ou Bantu Spaceship.
« C’est bien financièrement et aussi, d’un point de vue artistique, nous produire en Europe nous aide à devenir des artistes professionnels », souligne Joshua Chiundiza.
« Beaucoup de musiciens en Afrique ou en Asie ne se rendent pas compte du niveau qu’il faut avoir pour être à la hauteur de ce qui est déjà proposé ici », confirme François Cambuzat.
« En Europe, les choses sont mieux organisées, beaucoup plus mises en valeur et prises au sérieux », apprécie Oumar Ngom, dont le « plus grand souhait est de pouvoir faire de la musique à plein temps ». « Je suis tellement impatiente de démissionner de mon boulot! », confirme Thando dans un éclat de rire.
Avec AFP