Sommet de l’UA : Moussa Faki dresse un « tableau peu reluisant » du continent

Sommet de l'UA, Moussa Faki dresse un "tableau peu reluisant" du continent. Crédit photo : Union africaine
Coups d’Etat, élections truquées, conflits: le président de la Commission de l’Union africaine a dressé un « tableau peu reluisant » du continent à l’ouverture samedi du Sommet des chefs d’Etat de l’organisation panafricaine, à la crédibilité en berne.

La Libye « reste divisée », le Soudan « meurtri », « la Corne de l’Afrique génère les tendances les plus inquiétantes », « les Grands Lacs multiplient les signes d’aggravation » et le Sahel « inquiète au plus au point », a énuméré Moussa Faki Mahamat, après avoir évoqué la multiplication des conflits dans le monde, notamment à Gaza et en Ukraine.

« En Afrique, le terrorisme destructure certains de nos Etats », « les changements non constitutionnels de gouvernement se sont multipliés » et « notre échec à contrer un tel phénomène est patent », alors que « les élections sont devenues par l’ampleur de leurs irrégularités des facteurs d’approfondissement de crises », a-t-il également relevé.

Le président de la Commission de l’UA a appelé le Sénégal, « pays modèle en matière de démocratie » – plongé dans la crise début février par la décision du président Macky Sall de reporter la présidentielle à trois semaines du scrutin – à retrouver « la voie de la sagesse ».

L’ajournement de l’élection a depuis été invalidé par le Conseil constitutionnel, un véto auquel le chef de l’Etat s’est engagé à se conformer.

Saluant cet engagement, M. Faki a souhaité la tenue d' »élections inclusives, libres et transparentes dans les plus brefs délais possibles », comme l’a demandé la juridiction constitutionnelle sénégalaise.

Suspendus en raison de coups d’Etat, six des 55 Etats membres manquent cette année à l’appel du Sommet, le Gabon et le Niger ayant en 2023 rejoint le Mali, la Guinée, le Soudan et le Burkina Faso, exclus les deux années précédentes.

En marge du Sommet, le président angolais João Lourenço, médiateur de l’UA, a réuni vendredi à Addis Abeba plusieurs de ses pairs africains pour examiner la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), en présence notamment du président congolais Félix Tshisekedi.

Selon les services de ce dernier, les discussions devaient se poursuivre samedi.

L’est de la RDC est à nouveau en proie depuis fin 2021 à un conflit opposant la rébellion du M23 – appuyé, selon de nombreuses sources, par le Rwanda – à l’armée congolaise associée notamment à des groupes armés dits « patriotes ».

Alors que l’UA est souvent critiquée pour son inefficacité, M. Faki n’a pas épargné les dirigeants du continent.

Il a dénoncé des décisions prises « sans volonté politique de les appliquer », assurant que ces trois dernières années « 93% des décisions n’ont pas été mises en oeuvre ».

« Il est devenu « banal de voir » les Etats-membres « outrepasser, voire allègrement violer les décisions des organes continentaux », notamment du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, a-t-il déploré.

– « Résistance des pays membres » –

« La résistance de pays membres qui ne veulent pas voir des précédents pouvant heurter leurs propres intérêts » continue d’empêcher l’UA de « faire entendre sa voix », expliquait avant le Sommet à l’AFP Nina Wilén, directrice du programme Afrique de l’Institut Egmont pour les relations internationales établi à Bruxelles.

Elle affirmait douter « qu’il y ait des décisions fortes » durant cette réunion.

Samedi, le président comorien Azali Assoumani a transmis la présidence tournante de l’UA à son homologue de Mauritanie, Mohamed Ould Ghazouani, sur la personne duquel l’Afrique du Nord – région à qui revenait le poste – a finalement trouvé un consensus après un long blocage dû à l’antagonisme entre Algérie et Maroc.

Moussa Faki a salué l’accession en septembre de l’UA au sein du G20, appelant l’Afrique à apporter « de façon efficace (sa) contribution ».

Une contribution qui ne pourra se faire sans de « nouvelles méthodes de travail » pour élaborer « une position africaine » au G20, expliquait avant le Sommet à l’AFP Paul-Simon Handy, directeur régional Afrique de l’Est à l’Institut des études de sécurité (ISS).

Il faut, selon lui, pour les Etats membres « pouvoir construire une position africaine au besoin entre les sommets » bisannuels des chefs d’Etat, lieux traditionnels des prises de décision.

Attendu, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres n’a pas pu venir à la cérémonie d’ouverture, du fait de problèmes de vols, a indiqué à l’AFP sa porte-parole, Stéphanie Tremblay.

Avec AFP

 

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