MM. Sonko et Faye ont, à leur descente d’avion au Cap Skiring, aussitôt pris place dans un véhicule 4X4 noir aux vitres teintées, acclamés par des centaines de personnes à l’aéroport de cette station balnéaire parmi les plus importantes destinations touristiques du pays, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Le candidat Faye, 43 ans, en boubou et casquette blancs, a été le premier à apparaître, suivi de M. Sonko, 49 ans, en chemise vert-pâle et également en casquette, tous les deux les bras levés en signe de victoire, devant une foule majoritairement jeune qui scandait « Diomaye président ».
Un convoi de plusieurs dizaines de véhicules est ensuite parti de Cap-Skiring, à quelque 80 km de Ziguinchor, principale ville de Casamance dont M. Sonko est le maire, dans une région qui est son fief.
En Casamance, « je suis dans mon domaine. Cet accueil sera unique » pendant la campagne électorale, a déclaré M. Faye à l’étape de Oussouye, près du Cap Skiring.
S’il est élu, il ferait des problèmes de cette région, enclavée et minée depuis plus de 40 ans par une rébellion indépendantiste armée, « une urgence à régler ». La Casamance « aurait dû être la capitale économique et culturelle du Sénégal en raison de ses nombreuses potentialités » agricoles, forestières et touristiques notamment, a-t-il ajouté.
M. Faye a fait part de son « projet d’un Sénégal souverain, un Sénégal de justice, un Sénégal de prospérité », à l’étape de Ziguinchor où le convoi est arrivé alors que la nuit était complètement tombée.
« Il reste une semaine avant la présidentielle. Dimanche prochain (24 mars), à pareille heure, nous serons en train de célébrer la victoire de Bassirou Diomaye Faye comme cinquième président du Sénégal », a déclaré Ousmane Sonko à Ziguinchor.
« Voter Bassirou Diomaye Faye, c’est voter deux fois pour Ousmane Sonko », a-t-il poursuivi, réitérant le tandem avec le candidat qu’il a choisi.
La caravane, qui devait sillonner la région, a attiré plusieurs milliers de personnes le long des localités traversées.
Les deux opposants Sonko et Faye, emprisonnés depuis 2023, ont été libérés jeudi soir après des mois de détention, en vertu d’une loi d’amnistie à l’instigation du président Macky Sall, qui ne se présente pas au scrutin présidentiel après deux mandats de sept et cinq ans.
Ce premier déplacement des deux hommes hors de Dakar a lieu alors que la campagne électorale a été écourtée par le report surprise du scrutin par le président Sall, initialement prévu le 25 février.
Sortis de prison, MM. Sonko et Faye, président et secrétaire général du parti Pastef dissous, peuvent désormais participer à la campagne, qui met aux prises 18 hommes et une femme.
Ousmane Sonko a été disqualifié de la présidentielle en janvier, le Pastef désignant alors M. Faye.
– « Diffamations et calomnies » –
Lors d’une conférence de presse commune vendredi, les deux hommes s’en sont pris au candidat du pouvoir, l’ex-Premier ministre Amadou Ba. « S’il est élu, il sera le président des pays étrangers », a dit M. Sonko, accusant M. Ba d’avoir couvert des malversations.
M. Sonko « récidive en consacrant toute une conférence de presse à des diffamations et calomnies insipides », a rétorqué, dans un communiqué, le camp de M. Ba, en campagne samedi dans le nord et l’est du pays.
Le programme de M. Faye le présente comme le « candidat du changement de système » et d’un « panafricanisme de gauche », qui promet de restituer au Sénégal sa souveraineté et renégociera, s’il est élu, les contrats d’exploitation du gaz et du pétrole ainsi que les accords de défense.
Cette plateforme décline les thèmes caractéristiques de M. Sonko, dont les diatribes contre la corruption, les élites, les multinationales et l’emprise économique et politique exercée selon lui par l’ancienne puissance coloniale française ont fait le succès du Pastef.
La mise en cause de M. Sonko par la justice, conjuguée aux tensions économiques et sociales et au flou longtemps maintenu par le président Sall sur un troisième mandat, a donné lieu entre 2021 et 2023 à différents épisodes d’émeutes, pillages et saccages.
Le report de la présidentielle a causé de nouveaux heurts.
Des dizaines de personnes ont été tuées et des centaines arrêtées depuis 2021, au cours de troubles qui ont fortement ébranlé un pays considéré comme l’un des plus stables d’une Afrique de l’Ouest secouée par les coups de force.
Avec AFP