Le président ougandais Yoweri Museveni, qui dirige l’Ouganda d’une main de fer depuis 1986, a promu à la tête de l’armée son fils Muhoozi Kainerugaba, pressenti par des observateurs pour prendre un jour sa succession. Cette annonce, rendue publique jeudi soir par le ministère de la Défense dans un communiqué, intervient après des années de spéculations sur l’avenir de Kainerugaba, un général de 49 ans habitué des déclarations polémiques sur les réseaux sociaux.
À la tête de ce pays d’Afrique de l’Est de près de 45 millions d’habitants, Museveni, 79 ans, est l’un des dirigeants africains les plus anciennement installés au pouvoir. Bien que Muhoozi Kainerugaba ait nié par le passé avoir l’intention de lui succéder, il a connu une ascension rapide dans les rangs de l’armée ougandaise.
Dans un message posté l’an dernier sur Twitter (rebaptisé depuis X), et retiré depuis, il avait annoncé sa candidature à la présidentielle de 2026. Il y avait semblé s’en prendre à son père, écrivant: «Combien de personnes sont d’accord avec moi pour dire que notre heure est venue? Il y en a assez des vieux qui nous gouvernent, nous dominent. Il est temps pour notre génération de briller».
Après une polémique en 2022 à propos d’un message de son fils unique menaçant d’envahir le Kenya, Museveni lui avait demandé de ne plus tweeter sur les affaires du pays. Le président Museveni avait alors présenté ses excuses au Kenya mais a néanmoins défendu son fils, le décrivant comme un «très bon général» et le promouvant à ce rang quelques jours plus tard.
«Bébé despote»
En tant que haut responsable militaire, Kainerugaba n’a en principe pas le droit de s’exprimer publiquement sur des questions politiques, mais il s’est depuis souvent immiscé dans ces discussions, provoquant des casse-tête diplomatiques pour l’Ouganda. Ses tweets de soutien aux rebelles tigréens en Éthiopie ont suscité la colère d’Addis Abeba, et ses réflexions sur l’invasion de l’Ukraine par la Russie et le coup d’État de 2021 en Guinée ont également fait froncer des sourcils. L’année dernière, il avait déclaré que l’Ouganda «enverrait des soldats pour défendre Moscou si jamais elle était menacée par les impérialistes», reprochant aux pays occidentaux de diffuser une «propagande pro-Ukraine inutile».
Pour de nombreux Ougandais, le fait que Kainerugaba se place en successeur potentiel de son père apparaît évident. Mais le gouvernement a, par le passé, durement réprimé les déclarations à ce sujet. En 2013, la police avait fermé deux journaux indépendants et deux stations de radio pendant 10 jours après qu’ils avaient publié une note confidentielle d’un général de haut rang alléguant que Yoweri Museveni préparait son fils pour lui succéder.
De nombreux anciens alliés de Museveni, dont son médecin personnel Kizza Besigye, se sont brouillés avec le président au fil de l’ascension de son fils, qui a également suscité la colère dans les partis d’opposition et chez d’autres détracteurs du gouvernement. En 2022, le célèbre écrivain ougandais Kakwenza Rukirabashaija a fui en Allemagne en affirmant avoir été torturé en détention pour avoir insulté Museveni et Kainerugaba, qu’il a notamment qualifié de «bébé despote».
Avec AFP