La province, connue pour ses violences politiques et les assassinats fréquents de conseillers municipaux, dans des règlements de comptes politiques, est actuellement dirigée par l’ANC. Sa partie septentrionale est cependant largement acquise au parti nationaliste zoulou Inkatha Freedom Party (IFP).
« Comme prévu, le MK a grignoté les voix de l’ANC et celles de l’IFP », constate Siphamandla Zondi, politologue à Johannesburg, en relevant qu’il était « évident que le MK obtiendrait un nombre important de voix » dans cette province.
Comme le reste des Sud-Africains, les dix millions de Zoulous, sur une population de 62 millions, ont été affectés par des coupures d’eau et d’électricité paralysantes, un chômage élevé et une pauvreté tenace, qui ont nourri une désillusion croissante à l’égard de l’ANC au pouvoir depuis trente ans.
Par ailleurs, l’ANC du KZN, encore plus qu’au niveau national, est en proie à des luttes intestines et à des factions. Au début du mois, le président des anciens combattants de l’ANC avait averti qu’une direction « faible » dans la province pourrait coûter des voix au parti, ce qui se vérifie cette semaine.
« Certains sont allés voter aux couleurs d’un certain parti, mais ont voté pour un autre », note Sihawukele Ngubane, professeur à l’université du KwaZulu-Natal (UKZN), parce qu’ils n’assument pas leur « trahison » mais sans doute aussi pour des raisons de clientélisme.
Duduzile Zuma, la fille de l’ex-président de 82 ans qui lui sert de bras droit, a elle-même décrit des « électeurs secrets du MK » qui se sont présentés aux urnes en T-shirts de l’ANC… pour mieux voter pour le MK.
– Maturité démocratique –
Outre leur déception à l’égard de l’ANC, accusé de n’avoir pas tenu ses promesses, les électeurs de la province zouloue « se tournent largement vers ce qu’ils connaissent, à savoir la personnalité et l’image de Jacob Zuma », explique Lubna Nadvi, professeure de politique à l’UKZN.
Charismatique en diable et poursuivi pour corruption, Zuma a annoncé en décembre qu’il ferait campagne pour le MK, qui emprunte le nom de l’ancien bras armé de l’ANC sous l’apartheid. L’ancien détenu de Robben Island et chef du renseignement du mouvement de libération a été suspendu de l’ANC un bon mois plus tard.
« Ca pose la question : Les électeurs savent-ils dans quoi Zuma a été impliqué? Ou alors ils savent, mais préfèrent l’ignorer et voter quand même pour lui », relève Mme Nadvi.
« Et qu’est-ce que cela dit sur la maturité de notre démocratie ? Sommes-nous à l’aise avec l’idée de voter pour des partis dirigés par des gens impliqués dans la corruption ? « , interroge-t-elle.
Cette semaine, une dirigeante du premier parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA, centre libéral), comme un haut responsable de l’ANC ont accusé le MK de jouer la carte identitaire, utilisant le terme connoté de « tribalisme ».
« C’est dangereux pour notre démocratie », note M. Ngubane. « Quand les Afrikaners votent pour le FF Plus », un parti identitaire blanc, « les accuse-t-on de tribalisme ? », s’indigne-t-il.
Pendant la campagne, tous les partis ont déployé des trésors d’énergie et de ressources pour séduire les électeurs zoulous.
Le MK, fondé en septembre, se présentait aux législatives pour la première fois et reste largement opaque dans son fonctionnement.
Aucun candidat n’a été mis en avant pour assumer le poste de Premier ministre provincial, si le MK remportait le KZN, et la structure du parti reste particulièrement nébuleuse.
« Le MK est une entité qui n’a pas fait ses preuves en matière de gouvernance… il n’a aucun historique », souligne Mme Nadvi.
Avec ANC