Protégé de Nelson Mandela qui l’avait distingué comme le plus prometteur de sa génération, le président sud-africain Cyril Ramaphosa, 71 ans, mise sur son maintien à la tête de l’Etat après les élections du 29 mai, si l’ANC, son parti historique, parvient à obtenir un score honorable.
Le Congrès national african (ANC) court le risque de perdre sa majorité absolue au Parlement, qui devra ensuite élire le président, selon les sondages les plus récents.
Certains prévoient un score aussi faible que 40% mais les analystes estiment qu’en dépit d’une désillusion croissante, nombre d’électeurs, une fois dans l’isoloir, voteront loyalement pour l’ANC, qui a défait l’apartheid et apporté la démocratie au pays.
Si l’ANC passe sous la barre des 50% de députés, il devra former un gouvernement de coalition pour se maintenir au pouvoir. Et à ce stade, aucune figure de l’ANC n’est venue contester la place de l’actuel président, affable et populaire.
En décembre 2022, le parti historique, divisé et en perte de vitesse, l’avait reconduit comme leader, l’adoubant pour un second mandat à la tête du pays, en dépit d’un scandale au parfum de corruption.
Un mois plus tôt, une commission parlementaire avait assuré qu’il pourrait avoir enfreint la loi : dans le cadre d’un cambriolage dans l’une de ses propriétés en 2020, de grosses liasses de dollars avaient été retrouvées cachées dans un canapé.
Il n’avait signalé le casse ni à la police ni au fisc, mais n’a pas été inculpé dans cette affaire. Mais très vite, une question s’était posée: peut-il rester à la tête du pays? Faute de successeur crédible, l’ANC avait imposé à ses élus un plein soutien, en dépit de nombreux tiraillements.
– « Faux super-héros » –
Cyril Ramaphosa a succédé au sulfureux Jacob Zuma en 2018, faisant de la lutte contre la corruption une priorité.
Mais le scandale de sa ferme de Phala Phala (nord-est) a fait « douter de sa probité et rappelle qu’il n’est pas un surhomme », souligne la politologue Susan Booysen, alors qu’il s’était forgé une image d' »icône du combat » anticorruption.
Fils de policier, Cyril Matamela Ramaphosa, né en 1952, a grandi à Soweto, foyer de la lutte contre l’apartheid. Parlant la plupart des douze langues officielles du pays, il a longtemps convoité la fonction suprême.
Étudiant en droit, il milite contre le régime raciste et passe onze mois à l’isolement en prison. Il se tourne vers le syndicalisme, rare moyen légal de contester l’apartheid. En 1982, il fonde le puissant syndicat des mineurs qui fait trembler le pouvoir blanc à coup de grèves massives.
A la sortie de prison en 1990 de l’icône Nelson Mandela, Ramaphosa rejoint ses équipes et contribue à la transition démocratique. Candidat à la présidence de l’ANC en 1999, le parti lui préfère Thabo Mbeki.
Il s’éloigne alors de la politique, se tourne vers les affaires et bénéficie de la politique d’émancipation économique des Noirs. Avec sa holding Shanduka, un temps propriétaire des licences locales de McDonald’s et Coca-Cola, il fait fortune, figurant parmi les Africains les plus riches du classement Forbes.
Marié trois fois – son épouse actuelle Tshepo Motsepe est la soeur du patron du football africain Patrice Motsepe -, ce père de cinq enfants nourrit une passion pour l’élevage de bovins rares, qui lui vaudra d’être surnommé « le buffle ».
Il revient en politique, d’abord comme vice-président de l’ANC en 2012, puis du président Zuma en 2014. Ce qui lui vaudra plus tard d’être critiqué pour être resté muet et ne pas avoir agi pendant cette période de corruption effarante.
Zapiro, caricaturiste le plus célèbre du pays, continue de le dessiner « sans colonne vertébrale ou en faux super-héros ».
Patient et fin négociateur, il prend enfin la tête de l’ANC en 2017. Une fois Zuma évincé l’année suivante, il prend les rênes du pays.
En dépit d’une forte popularité, il fait face aujourd’hui à un mécontentement croissant, nourri par le chômage, de fortes inégalités et des coupures d’électricité chroniques.
Avec AFP